Entrepreneuriat et jeux vidéo : une belle aventure
Quand Romain & Xavier, deux UTCéens, ingénieurs informatique diplômés en 2006 font de leur passion, un métier : une aventure humaine, technique et entrepreneuriale dans les jeux vidéo.
Le déclic
C’est à l’UTC que tout commença !
Xavier Liard et Romain Tisserand sont entrés dans l’entreprenariat en suivant l’unité de valeur en création d'entreprise (GE 15). Lors de cette formation, ils ont participé à la conception d’un business plan pour un projet de recherche visant à analyser et cartographier le web social et géré par des chercheurs et thésards de l’UTC. N’ayant plus de lien avec cette structure par la suite, c'est tout de même un grand plaisir de découvrir que ce petit projet devenu Linkfluence se cédera 50 millions d’euros 15 années plus tard en devenant un acteur incontournable du secteur.
A l’époque, travailler sur ce superbe projet concret a été pour eux un premier déclic !
Le grand saut
C’est au cours de leur projet de fin d’études en entreprise qu’ils commencèrent réellement à se poser des questions sur la suite de leur vie professionnelle.
Romain travaillait déjà sur des solutions innovantes : des émulateurs en ligne. Les centaines de milliers de visites mensuelles ont attiré l’attention de sociétés telles qu’Electronic Arts ou encore RIM (blackberry) intéressées pour commercialiser le service. Pour Romain, il fallait faire un choix. Répondre aux promesses d’embauche de ces entreprises ou créer une société pour commercialiser des services autour de ces émulateurs en ligne.
C’est à ce moment que Xavier et Romain décident de relever le challenge et de s’associer pour créer en 2007 DotEmu, qui deviendra de nombreuses années plus tard une référence du retrogaming.
A l’assaut du marché !
Les débuts ont été difficiles car avoir une technologie qui permet d’adapter massivement et rapidement des anciens jeux vidéo sur les plateformes modernes c’est une chose mais réussir à obtenir des licences de jeu connu et de les commercialiser mondialement en est une autre.
Rejoindre un incubateur Parisien, déposer un brevet et remporter un concours du ministère de la recherche ne suffit malheureusement pas à trouver son marché. C’est donc sans rémunération lors de la première année que les fondateurs serrent les dents jusqu'à une première levée de fond salvatrice.
Au pays du soleil levant
C’est finalement au Japon et aux USA que DotEmu décolle enfin avec la signature du jeu vidéo R-Type qui sera commercialisé par l’éditeur Américain Electronic Arts en 2009. Le jeu se positionne dans le top payant sur une des premières générations d’iPhone et les fondateurs se félicitent après deux années de tâtonnement d’avoir trouvé le modèle qui fonctionne.
Lors des premières années et avant l’apparition de l’iPhone, il était très difficile de vendre à l’international et les coûts de développement sur les mobiles de l’époque tels que Palm, Blackberry et Nokia étaient très importants. La distribution sur PC et console était quant à elle limitée aux jeux à gros budget et donc également difficilement accessible.
Grâce à Business France, ils ont fait par la suite de nombreux voyages au Japon et ont pu rencontrer leurs clients et partenaires dans les locaux prestigieux de l’Ambassade de France. C’est notamment lors d’un de ces voyages, que les fondateurs parviennent à travailler sur un jeu mythique de leur enfance : Final Fantasy 7!
DotEmu a par la suite négocié les droits de nombreux jeux vintages Japonais, qu'ils ont adaptés sur différentes plateformes, en particulier les smartphones et le PC.
Par la suite ils signent un autre classique du genre et c’est l’un des plus grands succès de DotEmu à l'époque, le jeu Double Dragon, une référence des années 90, qui leur permet d’avoir une première couverture TV sur LCI.
Et quel souvenir lorsqu’en 2009, ils rencontrent François Hollande au Japon pour lui présenter leurs jeux vidéo !
Envers et contre tous !
Souvent pris pour des fous, ils allaient devenir sans le savoir, des pionniers du « Rétrogaming » ! Après 7 années et commençant à sentir la limite d’une simple adaptation, les fondateurs décident de revendre DotEmu en 2014. Le choix du repreneur s’est porté sur une famille d’entrepreneur dynamique qui a su apporter ce qui était nécessaire à la croissance de DotEmu : de grosses ressources financière et l’ambition de réaliser non seulement des adaptations mais également des suites de jeux populaires des années 90. Après notamment avoir vendu plus d’un million d’exemplaires de Streets of Rage 4, les repreneurs cèdent DotEmu à leur tour pour plus de 38 millions d’euros.
Une nouvelle aventure !
L’inaction n’étant pas leur fort, nos deux compères se lancent rapidement dans une nouvelle aventure. C’est en 2015 que Romain et Xavier créent leur deuxième société : Playdigious.
Au démarrage, la société comprenait 2 activités principales :
- La première, AdTrial, permettait d’essayer des jeux mobiles directement dans la publicité avant de les télécharger. La technologie basée sur du cloud gaming fonctionnant en HTML5 pour s’intégrer le plus facilement possible dans les espaces publicitaires existants. Ils ont investi beaucoup d'argent et d'énergie dans cette application financée d’une part via une levée de fond et d’autre part via leur apport personnel.
- La seconde, plus traditionnelle pour eux, consistait à adapter des jeux issus de consoles électroniques sur des mobiles.
Une dure décision
En 2017, c’est autour d’un petit déjeuner dans un café parisien qu’ils prirent l’une des plus dures décisions de leur parcours d’entrepreneur. Malgré son potentiel, l'activité AdTrial, demandait trop d'énergie et de capital. Un déplacement aux Etats-Unis leur avait permis de trouver plusieurs investisseurs potentiels qui souhaitaient que Romain et Xavier restent aux commandes de l’activité.
Ils se sont rendu compte que ce projet ne les intéressait plus et c’est à contrecœur qu’ils décidèrent d’arrêter l’activité AdTrial pour se recentrer sur l’essentiel de la start-up.
Les leçons d’un recentrage
Créer une 2ème société n'est pas forcément plus facile que la première, tout est dans le timing. Pour leur 1ère société, ils étaient légèrement en avance alors que pour la 2nde, ils étaient peut-être trop en avance.
De plus, il est important de ne pas tout miser sur la technologie même si le système pousse vers cela. Les investisseurs et les aides sont plutôt orientés recherche et innovation. Il faut tenir compte du besoin, connaître les attentes et les besoins de ses futurs clients. Il ne faut pas être trop disruptif.
Si cette décision a été douloureuse, elle a été salutaire puisque que chiffre d'affaires de la société est passé de 800 K€ en 2018 à 15M€ en 2022 (*Clôture juin).
En 2021, les fondateurs décident à nouveau de céder la société, cette fois à un groupe Suedois spécialisé dans le secteur. Cette acquisition permet d’effectuer dans la foulée une introduction en Bourse. Quel plaisir pour Xavier qui a pu se rendre sur place pour l’évènement et faire tinter la cloche pour fêter l’introduction au Nasdaq First North à Stockholm.
Actuellement, ils travaillent toujours chez Playdigious, au sein d’un groupe d’une centaine de personnes.
Un de leurs souvenirs concerne le jeu Dead Cells. Les créateurs du jeu pensaient qu'il était impossible de transférer ce jeu sur un téléphone portable. Romain et Xavier se sont engagés à tester la faisabilité par leur propre moyen et de le faire gratuitement. Et ils ont réussi ce pari.
Et ce fut le jeu qui a le mieux réussi dans leur société actuelle. Il faut parfois suivre ses intuitions et avoir confiance en ses compétences.
Un des enseignements de leur aventure est que la maîtrise de l’informatique embarquée a été un facteur de leur réussite. Ce qui leur a permis d'utiliser les fonctions de bas niveau. Et de travailler dans un environnement contraint, avec peu de mémoire, un clavier limité, une interface homme-machine limitée. Il s'agissait d'un pari à la fois technique et business.
Les enseignements
L’une des principales clés de la réussite pour Romain est qu'il faut faire quelque chose qui vous plaît, y compris en création d'entreprise !
Quant à Xavier, il explique qu’il est primordial de demander de l’aide et des conseils à des professionnels du secteur. Bien sûr, tous ne seront pas à prendre en considération, il faudra adapter les retours selon ses besoins mais aussi son intuition. Il faut oser échanger, confronter et partager son concept sans trop craindre de se faire voler son idée. Très souvent l’important n’est pas l’idée mais son exécution.
Au début, ils pensaient que la première motivation était financière. En réalité, ils se sont vite rendu compte que l’essentiel est d’être en phase avec son activité, son équipe et ses clients.
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